Athlétisme Féminin Nouvelles

Alors que Kelsey Balkwill prend les virages tout récemment refaits du complexe sportif Dennis Fairall à la vitesse de l’éclair, elle jette un coup d’œil furtif de côté du tableau des records des Lancers affichant les noms des légendes de la communauté d’athlétisme de Windsor.

Une Lancer depuis quelques mois seulement, la candidate à la maîtrise en cinétique humaine a déjà prouvé qu’elle est faite de la même étoffe que les autres athlètes d’élite immortalisés sur ce mur. Le nom de cette native d’Essex, Ontario, a déjà surclassé celui de l’Olympienne Melissa Bishop et se retrouve à égalité avec, entre autres, ceux des illustres Lancers, Ryan MacKenzie et O’Brian Gibbons. On y lit : « 300 m — Kelsey Balkwill — 37,99. »

Une fois son entraînement terminé, elle contemple longuement la piste bleue, attendant patiemment le 7 mars — le jour où les meilleures en athlétisme au pays se mesureront à elle dans sa propre cour.

L’objectif principal du championnat U SPORTS est de gagner, mais j’aimerais aussi essayer de briser le record des Lancers au 600 m. 

Balkwill

La tâche n’est pas mince. Le record de 1 : 30,48 tient depuis 2010 ; il appartient à Bishop qui a raté de peu le podium à Rio, en 2016, en terminant en quatrième place au 800 m.  

Mais pour l’Olympienne Balkwill, il ne s’agit pas d’un cas où une athlète prend ses rêves pour la réalité. La spécialiste du 400 m haies a, jusqu’ici, connu une année digne des annales. D’abord, elle a battu le record des Lancers au 300 m, lors du Classique Can Am à Windsor — sa première course en 2018. Deux semaines plus tard, dans l’Indiana, elle a enregistré un temps de 1 : 30,84 au 600m — menaçant dangereusement le record de Bishop. Elle a poursuivi avec un record personnel de 52,64 au 400 m au tournoi sur invitation Tyson, dans l’Arkansas, à la mi-février. Son chronomètre l’a qualifiée pour le championnat mondial en salle de l’AIA à Londres, en Angleterre, qui a lieu une semaine avant le championnat U SPORTS.

Kelsey_Balkwill_possible_feature.jpg (197 KB)

L’ancienne athlète de la NCAA, qui a évolué pour les Hurricanes de l’Université de Miami, donne à un horaire vigoureux d’entraînement et de compétitions une allure d’une promenade détendue en atteignant régulièrement de nouveaux sommets personnels et en fracassant les records des Lancers semaine après semaine. Mais, comme c’est le cas pour la plupart des athlètes, le succès exige beaucoup de patience et ne vient souvent qu’au prix de sérieux combats. Le cas de Balkwill ne fait pas exception à la règle.

Mentalement, si tu souffres d’une blessure, tu trouves l’énergie pour t’en sortir. Lorsque ça se produit à répétition, ça finit par t’épuiser.

« Il y a eu plusieurs moments, avant aujourd’hui, où j’ai voulu tout lâcher, » se souvient-elle.

Une carrière prometteuse à l’école secondaire à Windsor avait précipité environ 65 offres de bourses étudiantes d’un bout à l’autre de l’Amérique du Nord. Balkwill se rappelle avoir choisi Miami d’abord pour son climat tempéré. Lorsqu’elle y est arrivée en 2011, toutefois, ce fut le désastre.

« Je devais composer avec quelques blessures mineures à l’automne et à l’hiver de ma première année, » se rappelle Balkwill, « alors j’ai amorcé ma carrière comme athlète de la NCAA lors de la saison plein air. Dans ma première course, le 400 m haies, je me suis fracturé l’os naviculaire à la septième haie. Je l’ai entendu craquer au moment de sentir la fracture — je savais que c’était sérieux. En fin de compte, on a découvert que j’avais de multiples fractures de stress au pied. J’ai dû dire adieu à ma première année. »

Il s’en est suivi une série de nouvelles fractures de stress entre mes séances sporadiques d’entraînement.

DAN_JANISSE_WINDSOR_STAR.jpeg (54 KB)
(Credit: Dan Janisse / Windsor Star) 

« J’ai dû gérer des problèmes additionnels aux pieds qui m’ont fait rater la saison plein air de ma deuxième année. Je n’ai pas couru l’été suivant, » dit-elle. « Dans ma troisième année, je me présentais aux courses en salle avec une botte de marche que j’enlevais pour courir. J’étais très loin d’atteindre mon potentiel. »

Les blessures commençaient à avoir des conséquences néfastes pour Balkwill.

 « Mentalement, si tu souffres d’une blessure, tu trouves l’énergie pour t’en sortir. Lorsque ça se produit à répétition, ça finit par t’épuiser, » explique-t-elle, admettant qu’elle s’est même mise à détester ce sport.

« L’aspect le plus frustrant d’être blessée, c’est que je savais que je pourrais être très bonne. Mais je savais également qu’aussi longtemps que je serais blessée, je ne pourrais pas être rapide. Ça, c’était très difficile à accepter. Entre mes années désastreuses à Miami, ma famille m’encourageait à prendre mon mal en patience et me poussait à retourner à l’école après chacun de mes étés à la maison, alors que je ne voulais plus retourner en Floride. Ma famille savait qu’au fin fond, j’adorais courir et voulait me voir heureuse. »

S’il y a eu un aspect positif dans la vie de Balkwill, au cours de ses trois premières années, ce furent ces étés chez elle. Bien que ces périodes ne se prêtaient guère à la course, elles lui ont permis de renouer avec son entraîneur du secondaire, Kurt Downes.

Lorsque Kelsey est arrivée, en huitième année, c’était une jeune en forme qui désirait s’améliorer. Ça m’a donné la piqûre comme entraîneur.

Kurt Downes

« Lorsque les jeunes partent vers d’autres destinations, je m’attends à ce qu’ils fassent la transition au plan de match de leur entraîneur universitaire, » dit Downes. « Mon rôle se borne alors à être là pour eux s’ils ont besoin de moi. Dans le cas de Kelsey, elle revenait l’été et avait visiblement besoin de certains ajustements. Nous nous sommes assurés de lui redonner sa santé, d’abord ; nous avons travaillé l’aspect nutrition et, lorsqu’elle repartait à l’automne, elle était en meilleure forme que lorsqu’elle nous était arrivée. »

ext.jpeg (100 KB)

Bien qu’il ne la voyait que quelques mois par année durant les études au baccalauréat de Balkwill, Downes a fait tout ce qu’il a pu pour la remettre d’aplomb. Son empressement à vouloir l’aider à réussir était solide et profond, un retour du balancier — pour ainsi dire — puisque Downes estimait que Balkwill l’avait elle-même aidé à amorcer sa jeune carrière comme entraîneur. Downes venait de mettre un terme à sa carrière comme capitaine de l’équipe d’athlétisme des Lancers, où il avait concouru sur la scène nationale dans les sprints et les sauts, lorsqu’il a fait ses débuts comme entraîneur. L’une de ses premières athlètes avait été une jeune préadolescente du nom de Balkwill. Leur relation a vite fait de devenir symbiotique.

« J’apprenais à devenir entraîneur, » se rappelle-t-il. « Lorsque Kelsey est arrivée, en huitième année, c’était une jeune en forme qui désirait s’améliorer. Ça m’a donné la piqûre comme entraîneur. J’avais vraiment du plaisir à travailler avec elle. Elle n’était pas comme les autres. Tout ce que je lui conseillais de faire, elle prenait le temps de l’assimiler et de l’appliquer. Qui plus est, elle déteste perdre tout autant que moi. Là-dessus, nous nous entendons à merveille. »

Par conséquent, il n’est guère étonnant que Balkwill ait finalement atteint le succès dans sa quatrième année avec les Hurricanes et qu’elle ait pris la décision de poursuivre l’athlétisme après ses études collégiales. Elle savait aussi exactement où elle voulait le faire.

« Je voulais revenir à Windsor et m’entraîner avec Kurt. Il me connaît tellement bien comme athlète et comme personne, en plus de croire aux objectifs que je me suis créés. C’est tout ça mis ensemble qui m’a motivée à m’entraîner chez moi. »

Mes partenaires d’entraînement actuelles me font adopter une attitude vraiment saine face à l’athlétisme. Nous rions et blaguons durant les entraînements, mais en même temps, nous avançons toujours. C’est un merveilleux environnement. Nous nous poussons mutuellement à devenir meilleures.

Balkwill

Depuis son départ de la NCAA et ses véritables retrouvailles avec Downes, à l’été 2015, Balkwill est demeurée en santé, a réalisé des sommets personnels, et s’est qualifiée pour trois équipes nationales canadiennes.

« Je lui ai dit qu’elle serait peut-être mieux ailleurs, » dit Downes, « mais c’est ici qu’elle voulait être. »          

C’est aussi l’idée de se retrouver au sein d’un groupe d’entraînement « tricoté serré » qui a poussé Balkwill à revenir au bercail.

« Mes partenaires d’entraînement actuelles (qui incluent les athlètes U SPORTS Alexia Lamothe au 60 m haies et la coureuse au 300 m classée troisième du circuit universitaire canadien, Courtney Rivait) me font adopter une attitude vraiment saine face à l’athlétisme. Nous rions et blaguons durant les entraînements, mais en même temps, nous avançons toujours. C’est un merveilleux environnement. Nous nous poussons mutuellement à devenir meilleures. »

 

En ce moment, avec l’aide de ses coéquipières et de Downes, Balkwill est au cœur de ce qui seront les trois semaines les plus mouvementées de sa carrière athlétique : les championnats SUO, le championnat mondial en salle de l’AIA et les U SPORTS sont étalés sur trois weekends consécutifs.

« Nous nous sommes assurés d’avoir le meilleur regroupement de spécialistes pour nous aider, » affirme Downes. « À l’automne, nous avons attaqué l’aspect psychologique du sport ; nous avons la chance d’avoir l’aide constante du physiothérapeute de Kelsey qui sera avec nous aux SUO et aux U SPORTS et nous travaillons très étroitement avec une nutritionniste. »

Le menu personnel de Balkwill est également tout décidé et planifié d’ici les championnats. « Je suis tellement chanceuse d’avoir l’aide et les conseils de quelques merveilleux spécialistes, » dit-elle, « ça m’enlève une grande partie du stress de préparation à la compétition. »

Bien qu’elle admette préférer la planification à court terme qu’à long terme, Balkwill espère utiliser les championnats U SPORTS de cette année comme tremplin vers ce que lui réserve l’avenir.

« Le but ultime, en ce moment, est de me rendre à Tokyo pour les Olympiques de 2020, » dit-elle. « Mais, pour l’instant, je me concentre d’abord et avant tout sur la constance de mon entraînement, tout en m’amusant à le faire. Le fait d’être en santé et de m’entraîner dans un environnement aussi merveilleux m’a redonné l’amour de l’athlétisme. »

Voyez Balkwill concourir aux championnats U SPORTS du 7 au 10 mars à l’Université de Windsor.   


Alex_Cyr.jpg (413 KB)Alex est un étudiant en première année de maîtrise à l'Université de Windsor, étudiant la psychologie du sport. Il a complété son baccalauréat à l'Université St. Francis Xavier, où il a commencé sa carrière sportive universitaire en tant que athlète de cross-country et d’athlétisme pour les X-Men de StFX. Alex est rédacteur par intérim pour Athlétisme Nouveau-Brunswick et écrit un blog sur le site Web canadien de  course à pied, Trackie.com

Suivez Alex sur Twitter @Cyresy_10